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Love Life (OCS) : l’anti comédie romantique d’Anna Kendrick (sans spoilers)

Anna Kendrick dans une série de genre (anti) comédie romantique ? Love Life l’a fait, et le résultat est étonnant. Analyse dans cette vidéo (Transcript sous la vidéo) :

Analyse de la série Love Life

Transcript :

Love Life suit Darby Carter, newyorkaise qu’on suit de 25 à 35 ans dans sa vie amoureuse. Pendant 10 ans, nous la voyons voguer d’homme en homme, d’emploi en emploi, avec ou sans ses amies, à la recherche du grand amour, mais aussi d’une vie plus apaisée.

Love Life a été vendue comme une comédie romantique… et non. Non. Non. C’est parfois léger, mais ce n’est pas une série comédie romantique, mais un drama.

Love Life : dans le genre « romance réaliste »

Le sujet de Love Life fait pas mal penser à How I Met Your Mother. Dans cette grande sitcom des années 2000, on suivait pendant 10 ans le jeune Ted à la recherche de son grand amour. Darby et Ted sont deux êtres sensibles, parfois victimes parfois coupables dans les échecs de leurs relations. Mais là où How I Met Your Mother choisit la comédie romantique, Darby s’inscrit dans une tendance très récente, que j’appellerais « la romance réaliste ». On peut remonter les premiers essais du genre avec Le Temps des Copains dans les années 60, ou Génération Pub dans les années 80. Mais c’est vraiment depuis la fin des années 2000 qu’on assiste à des séries qui examinent le couple dans son état le plus brut.

Le couple à nu (à tous les sens du terme) dans la radicale série Tell me you love me (2007)
Ian Somerhalder et Michelle Borth dans Tell me you love me (2007) : la série la plus radicale sur le couple

La plupart des épisodes de Love Life suivent le format 1 épisode = 1 nouveau partenaire. Avec parfois des retours avec des ex. C’est typiquement le format qui était utilisé dans 100 Questions, une brève sitcom où une jeune femme se rappelait à chaque épisode d’un rencard de sa vie. Mais là où 100 Questions n’est pas allé plus loin que son pitch, Love Life propose autre chose.

Une comédie romantique mélancolique

Love Life est mélancolique. Elle parle de solitude, d’instabilité professionnelle, des mécanismes de défense qu’on se créé parce qu’on a peur que les autres nous voient tels qu’on se voit nous-mêmes. Et quand on voit le nom des producteurs derrière, ce n’est pas anodin. La série a été créée par Sam Boyd, à qui on devait déjà une comédie romantique, In a relationship. Le film suivait 2 couples durant tout un été. Bien qu’inégal, l’on sentait déjà une volonté de regarder le couple d’une manière moins superficielle que dans les comédies romantiques. Surtout, 3 des producteurs de Love Life ont travaillé sur Zoey’s extraordinary Playlist, comédie musicale sur des gens dépressifs. Ils ont aussi travaillé sur Quelqu’un de bien, une romcom assez mélancolique de Jennifer Kaytin Robinson. Robinson a d’ailleurs réalisé l’épisode le plus dramatique de Love Life.

Anna Kendrick dans Love Life (2020-) de Sam Boyd
Anna Kendrick dans Love Life (2020-)

Love Life met en avant des tendances contemporaines : l’héroïne par exemple n’arrête pas de changer de boulot. On voit aussi des femmes dans un couple hétéro qui gèrent le côté matériel du ménage, et qui en retour subissent l’ingratitude de leurs mecs. La fameuse « charge mentale ». Après, le sexisme marche dans les deux sens : quand Darby traite mal un de ses coups d’un soir, elle n’est pas mieux que certains mecs. Darby est un très bon portrait. Un personnage anti romcom, mais qui pourtant a comme références les romcoms.

Love life n’a pas peur de traiter de thèmes plus graves comme la dépression. Darby a des périodes dépressives, son amie Sara est une drug addict clinique. Love Life est autant une dramedy sur le couple qu’un commentaire sur l’errance urbaine, un thème dans l’air du temps, car c’est celui de la série High Fidelity. La série est aussi honnête sur les relations, rappelant qu’un couple dépend des circonstances extérieures. Un deuil, un chômage, cela peut suffire pour exploser une relation.

L’originalité des personnages de Love Life

Même si elle n’est pas aussi précise que Easy, la superbe anthologie de Netflix sur les couples (clairement le modèle de Love Life), on retrouve dans la série le soin sur les dynamiques de pouvoir entre couples. En réalité, Love Life est à mi-chemin entre Easy et Valeria, car la présence d’Anna Kendrick, d’ailleurs excellente dans un rôle loin de son style habituel, demande quand même une touche de glamour qui fait penser au style chronique de vie glam’ de Valeria.

Valeria (2020-) et son parti pris entre réalisme et glamour proche de Love Life
Entre réalisme et glamour, Valeria (2020-) a un parti pris pas si éloigné de Love Life

Dans la série, Darby a peur de ne pas être aimée, et réagit en tant que lâche, un trait qu’on accole plutôt au masculin. La peur de l’abandon, de ne jamais être aimée, est un trait récurrent chez les héroïnes de séries. C’est surtout le cas dans la série Les Vies rêvées d’Erica Strange, sans doute le modèle du genre. À part Magnus, cliché de l’homme-ado, les autres hommes ont leurs qualités, leurs défauts propres. Cela change des mecs de base qu’on voit dans les séries en général.

Un peu prévisible, mais une belle série sur le couple

Il y a quelques défauts dans Love Life, notamment une voix off complètement inutile. Comme si le créateur Sam Boyd n’avait pas confiance en son propre talent. Il nous surexplique ce qui est visible, ce qu’on comprend à l’écran. Au bout de 10 épisodes, on voit un peu trop le même schéma rencontre-euphorie-dégradation-rupture… Enfin, la fin, assez particulière, fait penser à celle de How I Met Your Mother : trop rapide, manquant d’intensité, et pourtant à la fois sans illusions, optimiste, et transgressive. Parce que toutes deux refusent la fin-type de la comédie romantique.

Alors, regardez Love Life avec Anna Kendrick. La série est disponible sur OCS Max dès le 9 juillet. C’est vraiment une belle série à voir. Les belles œuvres sur le couple ne sont pas si fréquentes que ça.

Clément Diaz
Docteur en binge-watching. Je parle séries comme je respire. De I Love Lucy à Twilight Zone en passant par Le Prisonnier et Kaamelott, je regarde, j'analyse, je critique, je décortique. Parfois, je dors.
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